FR
Texte reproduit de La libre Belgique.
Dans les bidonvilles du Cap, des milliers de potagers biologiques ont poussé en l’espace de quelques années. Une initiative de l’ONG “Abalimi”.
Reportage Correspondante en Afrique du Sud : Patricia Huon
Au milieu de baraques en tôle du township de Gugulethu, près du Cap, deux vieilles dames inspectent les salades qu’elles ont plantées. À 74 ans, Philipina Ndamane devrait jouir de sa retraite. Mais, suite au décès de quatre de ses enfants, emportés par le sida, elle se retrouve avec sept petits-enfants à charge. Et sa maigre pension ne suffit pas à les nourrir.
Il y a dix ans, avec trois autres grand-mères et avec l’aide de l’ONG Abalimi (" les planteurs ", en langue xhosa), elle a transformé un terrain vague en potager. " Avant, nous allions souvent dormir le ventre vide. Aujourd’hui, il y a toujours de quoi manger sur la table ", témoigne Philipina. Quotidiennement, elle ramène des légumes pour ses petits-enfants, mais aussi pour deux voisines séropositives. " C’est important pour elles d’avoir des vitamines ", fait remarquer la vieille dame.
Encore faut-il pouvoir se les offrir : trop chers, les produits frais sont inaccessibles pour la plupart des habitants des townships. " Un jardin, même tout petit, peut apporter une solution au problème de malnutrition ", affirme Rob Small, le fondateur d’Abalimi. À chaque personne qui désire cultiver, l’ONG fournit les premières graines, du compost, et une formation. L’association aide aussi à trouver un terrain : propriété d’école, de municipalité, de clinique... Et le ministère de l’Agriculture a fait creuser des puits à divers endroits.
Asande food garden 2009 (avant et après)
En 27 ans d’existence, Abalimi a ainsi été sollicitée pour mettre en place plus de 3 000 potagers privés et une centaine de jardins communautaires. Aucun pesticide ou engrais chimique n’y est employé. Produire bio est avant tout un choix éthique, mais c’est aussi une solution pratique: " Dans les townships, les gens sont souvent analphabètes, et ne savent donc pas lire les modes d’emploi " , constate Rob Small. " Avec l’agriculture biologique, il suffit de planter, de faire du compost, et les légumes poussent. Et c’est bien meilleur pour la santé !"
Pour un nombre croissant de cultivateurs des townships, les potagers représentent également une source de revenus. Le surplus de la récolte est vendu au marché, ce qui peut rapporter entre 200 et 1000 rands (entre 20 et 100 euros) par mois aux familles. Une somme non négligeable dans un pays où plus de 25 % de la population est au chômage.
Et, depuis 2008, grâce au récent boom du bio, les jardiniers ont trouvé un nouveau débouché pour leurs légumes. Ceux-ci sont distribués dans les quartiers aisés du Cap via un système de paniers bio (65 rands - soit 6,5 euros - la petite boîte et 95 rands - soit 9,5 euros - la grande), qui compte déjà près de 200 abonnés. Les bénéfices sont ensuite reversés à parts égales entre l’association (pour ses frais de fonctionnement et ses équipements) et les fermiers.
Pour Christina Kaba, directrice d’Abalimi, ce nouveau projet intitulé "Harvest of Hope" (les récoltes de l’espoir), représente un grand pas en avant : " Ces jardins sont de véritables diamants pour le township. D’un côté, les gens ont à manger et de l’autre ils peuvent aussi gagner de l’argent. Tout ça juste en faisant pousser des légumes ! ", s’enthousiasme-t-elle. S’ils sont produits selon des méthodes biologiques, les légumes d’Abalimi ne bénéficient actuellement d’aucun label. "Ce serait trop compliqué", explique Rob Small. " Il y aurait beaucoup de papiers à remplir et le bénéfice ne serait pas énorme. Nos clients nous connaissent et nous font confiance. Ils savent que nous sommes très stricts à ce niveau : si des gens utilisent des pesticides, ils sont exclus de l’association pour au moins un an ".
En 2009, un fonds, "The Farm and Garden National Trust", a été créé par Abalimi : il est destiné à diffuser le concept dans toute l’Afrique du Sud, et pourquoi pas dans tout le continent.
Site et formulaire de dons
Numéro de compte :
First National Bank, 34 St Georges Mall, Cape Town
Branch Code: 201309 Swift Code: FIRNZAJJ461
Acc.No. 50050041661
Account Type: Cheque/Current
Account Name: ABALIMI BEZEKHAYA